L’été dernier, maman était avec moi pour le pèlerinage de Jerba.
Et bien sur, nous profitons pour aller prier sur la tombe de mon père à Tunis.
On arrive donc à Tunis par une belle journée printanière.
Et bien sur, première visite, la tombe de mon père.
Pour y aller, il faut traverser un chemin de fortune parsemé de ronces et de broussailles.
Dix minutes plus tard, nous y sommes et bien sur comme il n’y a pas de rabbin, j’essaye d’improviser une prière. Comme j’avais mon portable qui me gênait, je l’ai posé à l’insu de maman sur la tombe. Je commençais donc à prier tandis que maman parlait avec mon père.
‘…Ah ye Deidou, cadech rhelit blastéc, toue’hech’tèc yesser. ( Ah Deidou, combien je t’ai langui et combien tu as laissé ta place.)
Elle pleure et moi le cœur serré, je compatis à la perte de mon pére.
Elle continue bien sur à rappeler sa mémoire. ‘Loucen jit hai, me neb’cah fél cadâaâ lajije e’di… !’ Si tu étais de ce monde, je ne serai pas dans cette situation peu enviable.
Je l’écoute bien sur et je ne dis rien, sauf que le soleil tape fort et je sue.
Elle continue. '...Hit, euchkoun i khé’mem e’li béch tkhelini ouehd’di fél sara… !'(Qui aurait cru que tu allais me laisser seule dans ce merdier… !’
Je l’écoute et je ne dis rien.
‘…Me jitch béch nech’qiléc, mélé béch net’féèd… !( Je ne suis pas venue pour me plaindre mais pour me soulager… !)
J’écoute bien sur sa désolation.
Puis, je lui dit ‘…Maman imagine maintenant que tu reçois un coup de fil de là bas… ?’
‘…D’où… ?’
‘…De chez mon père… ?’
‘…Ah comme si tu savais combien cela me ferait plaisir… !’
‘…Parce que tu sais que certaines personnes peuvent avoir des nouvelles de leur mort… !’
A ce moment là, le portable sonne.
‘…Je crois que c’est lui Maman, il a entendu tes jérémiades… !’
‘…Ah bon, tu crois… ?’
‘…Attends, je décroche… !’ Allô… ? Il y a du tkhechich ( des bruits étranges) Surement la circulation de là bas… !’
'...ALLLOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOO…. ! PAPAAAAAA…. !’
‘…Quoi tu l’as au bout du fil…. ?’
‘…Oui, je reconnais sa voix… !’
‘…Olalala, il te dit quoi… ?’
‘…Il dit qu’il se sent seul… !’
‘…Ah bon… ?’
‘…Il demande si tu… !’
‘…Si quoi… ?’
‘…Si tu es bien… !’
‘…Je viens de lui dire que je suis mal, il n’entend pas ou quoi… ?’
‘…C’est loin maman mais il me répète qu’il se sent très seul et si tu ne veux… !’
‘…Veux pas quoi….?’
‘…Si tu ne veux pas......!' Parce que là bas, il n’est pas bien… !’
‘…Passe le moi, je vais régler cette affaire honorablement… !
Elle prend le portable…
‘..Yé Deidou, zid ech’tèna chwiye, fél a’cal, e’ne menich mezrouba béch en ji… ! Narda aicha taht jouéneh débène khir fél jébèna… !’
( O Deidou, attend un peu, je ne suis pas pressée de venir, je préfère vivre sous les ailes d’une mouche qu’être enterrée au cimetière… !’
‘..Lève toi maman, je vois une nuée de Mouches qui arrive… ! ET JE NE CROIS PAS QUE CELA SOIT AGRÉABLE DE VIVRE LEURS AILES...!